La région du Haut Ienissei
Elle est plus connue en Mongolie sous le nom de vallée de Darkhad ou vallée des Lacs.
C’est une région peu importante tant par sa taille que par sa fréquentation touristique, mais elle doit faire l’objet d’un traitement à part dans la mesure où elle constitue plus un prolongement de la Sibérie qu’une marche de la Mongolie. Elle se situe entre les Monts Saian et Tangnou.
Long de 1.100 km, le Saian oriental fait partie d’une bordure en arc de cercle qui entoure la région d’Irkoutsk et du lac Baïkal. Les 3/5e de sa longueur forment la frontière entre la Sibérie russe et la Mongolie. Il se compose de roches cristallines et éruptives, signes des violents mouvements qui l’ont secoué à l’ère tertiaire. Le sol y tremble encore assez souvent. Les sommets sont des cônes arrondis, striés de neige et bordés d’éboulis de grosses pierres. Le point culminant, le Munku Sardyk, se dresse à 3.491 m avec son dôme tout blanc, en bordure nord du lac Khövsgöl (Hövsgöl). À l’est de ce pic, le col d’Obo-Sarym (Khankh) n’est qu’à 1.850 m tandis que les autres passages sont à 2.000/2.300 m ; les sommets s’élèvent à une altitude comprise entre 2.000 et 3.000 m (voir la carte du Khövsgöl page 115).
Le Tangnou (Tagnyn, Tangnu uul) oriental part de la source de la Tes (ou Tess) qu’il sépare de l’Ienissei. Resserré entre le Saian et le Tangnou, le bassin du haut Ienissei – qui deviendra un véritable monstre, l’un des plus grands fleuves de Sibérie – est séparé du lac Khövsgöl par une barre, le Khoridol Saridag qui culmine à 3.093 m. Malgré cette barre qui sépare le lac Khövsgöl du bassin du Haut-Ienissei, la vallée du Haut-Iénissei sera décrite dans le même chapitre que le lac pour des raisons pratiques. Car si la barre du Khoridol Saridag fait géographiquement coupure entre les deux bassins, c’est quand même du sud du lac Khövsgöl (de Khatgal) que l’on se rend à la vallée de Darkhad.
Deux bras de rivières partis du Saian oriental, côté russe, le Khamsara et le Beikem, descendant sur 300 km avec un dénivelé de 1.000 m, se réunissent pour former le Haut Ienissei ou Grand Ienissei comme l’appelent les Russes. Une troisième rivière, le Kukem, se joint à eux à 635 m d’altitude. Le futur grand fleuve s’appelle maintenant Ouloukem et est déjà large de 300 m. Il est encore rejoint par le Khamchik issu du Sailoughem (Siykhem). Et voilà qu’il se précipite à 60 km/h par un défilé qui perce le Saian et atteint la steppe de Minusinsk. Mais cela fait déjà longtemps qu’il a franchi la frontière. Les deux Iénissei se rejoignent à Kizil.
Côté Mongol, le Bas Iénissei ou Petit iénissei s’appelle Shiskhel en aval du lac de Tsagaan nuur et de la vallée de Darkhad. Les vallées du bassin du petit Iénissei et de ses prédécesseurs, sont plates et larges en général, dépassant parfois 10 km. Des berges à pic de quelques mètres encaissent les rivières, formant une terrasse humide, herbeuse, parsemée de marais et d’étangs, surmontée d’un second niveau plus sec, où quelques hommes pratiquent de rares cultures. Au-dessus de cette prairie qui ne dépasse guère 1.000 m, la forêt de cèdres, de sapins blancs, de mélèzes et de bouleaux gravit les pentes et couvre même les sommets de moins de 2.000 ou 2.200 m. Elle abrite une faune nombreuse : ours, loups, daims musqués, hermines, loutres, coqs de bruyère, léopards des neiges, wapitis, zibelines, gloutons, castors, etc. Les moustiques sont légion, pires qu’en Afrique. Au-dessus de 2.200 m, quelques aunes et rhododendrons nains se fraient un passage à l’air libre entre les blocs de granit recouverts de mousse.
Sur les quelques 165.000 km2 de cette contrée, à cheval sur la Mongolie et la Russie, habitent plusieurs dizaines de milliers d’Uriankhai-Touvas. Les Touvas tiennent probablement leur nom de la rivière Touba. Les Tsaatans peuplent également le nord du pays.