Le spécialiste du voyage responsable
Dossier Art Zoom sur les carnettistes de voyage du No Mad Festival 2019

Alix Thiébault, la carnettiste - scientifique

Alix est originaire de Toulon, dans le Var. Passionnée par le dessin et les sciences, elle parvient à concilier les deux dans son parcours : après avoir obtenu le diplôme de l'école de dessin Emile Cohl, à Lyon, elle monte à Paris pour se spécialiser en illustration scientifique à l'école Estienne. Elle se forme au terrain en dessinant sur des fouilles paléontologiques et des expéditions scientifiques.

Son premier voyage à Madagascar sera un coup de cœur, et elle y retournera plusieurs fois. Sensible à la biodiversité de ce pays, elle s'investit dans l'éducation à l'environnement en concevant des outils pédagogiques.

Quelle est votre particularité en tant que carnettiste de voyage ? Qu'est-ce qui vous démarque des autres ?

« Je suis ILLUSTRATRICE SCIENTIFIQUE de formation. Cela concilie mes deux passions, le dessin et les sciences, et en particulier les sciences du vivant. Sur le terrain, c'est ma sensibilité à la nature qui oriente mon regard et mon crayon. J'essaie de lui rendre hommage en retranscrivant fidèlement ses couleurs et ses formes. Par la suite, j'utilise autant que possible le dessin pour sensibiliser à la protection de l'environnement, en concevant des outils pédagogiques. »

Le dessin en voyage, pour vous c'est...

« GRAVER UN INSTANT dans ma mémoire. Lorsque je dessine, je suis concentrée sur mon sujet, et tous mes sens sont en éveil : je m'imprègne des sons, des odeurs, de l'ambiance... Lorsque je revois le dessin, tout me revient en mémoire, beaucoup plus intensément qu'avec une photo. C'est ce que j'aimerais provoquer chez les gens avec mes dessins : les plonger dans une atmosphère, leur raconter une histoire, éveiller chez eux des émotions. »

La destination qui vous inspire tout particulièrement et pourquoi ?

 « Je n'ai pas visité beaucoup de pays dans ma petite carrière, mais si il y en a bien un qui m'a marqué, c'est MADAGASCAR. Je ne me l'explique pas particulièrement, c'est un tout, un ensemble qui me correspond : la lumière, le climat, le rythme, l'état d'esprit des gens. C'est aussi un pays qui me coupe le souffle par la beauté de ses paysages et sa biodiversité exceptionnelle. Madagascar est source d'étonnement et d'émerveillement, mais également d'inquiétude, car les difficultés sociales et environnementales sont pressantes. »

Quelques mots sur votre façon de voyager...

« Je voyage avec des objectifs : METTRE MES COMPÉTENCES GRAPHIQUES AU SERVICE DE MISSIONS de sensibilisation, ou scientifiques, ou de cartographie... Ce qui ne m'empêche pas de dessiner à côté. Côté pratique, avec le temps, je deviens une voyageuse efficace ; je réduis mes bagages, je développe des astuces, j'apprends à me connaitre. Par exemple, je dors mieux par terre que sur un tapis de sol. En revanche, impossible de me passer de ma petite serviette pour me sécher les cheveux. Plutôt efficace en itinérance, je sais aussi occuper le terrain ; si l'on m'attribue un bout de chambre d'hôtel ou de 4x4, j'ai tendance à étaler mes affaires, au grand dam de certains... En revanche, mes carnets et mon matériel de dessin seront toujours bien protégés. »

De quoi vous remplissent vos voyages en tant qu'être-humain ?

 « Lors de mes voyages, j'avance les yeux grands ouverts et chaque expérience est un apprentissage. Plus réceptive et plus tournée vers les autres, MA FAÇON DE VOIR ET DE PENSER CHANGE. Je me découvre moi-même, je m'étonne parfois. Mais ce que j'aime le plus, c'est l'action et l'aventure. C'est VIVRE LE MOMENT PRÉSENT intensément. C'est ce que propose Madagascar en permanence. Quand je rentre en France, je mets plusieurs semaines à me réhabituer à ma vie "normale". Le choc des cultures est là : différence de consommation, de priorités... c'est difficile. Et ça me donne envie de repartir. »

Pour vous, qu'est-ce que le voyage responsable ? Comment le décririez-vous et quel en est son intérêt à vos yeux ?

 « Pour moi, le voyage responsable est un voyage qui veut avoir des RETOMBÉES SOCIALES POSITIVES tout en ayant UN IMPACT ÉCOLOGIQUE MINIMUM. Dans certains pays, le tourisme est un OUTIL IMPORTANT DE LUTTE CONTRE LA PAUVRETÉ, alors c'est une bonne chose qu'il soit mené avec des valeurs éthiques et écologiques responsables. Mais mes expériences m'ont appris à prendre du recul sur les discours idéalistes occidentaux. J'ai appris, en côtoyant des populations de culture différente, que les idées occidentales ne sont pas nécessairement des solutions durables aux problèmes locaux, surtout si elles sont imposées sans concertation préalable avec la population. Il faut être attentif à privilégier les échanges, à comprendre et mettre en avant la culture locale, afin de trouver des solutions à mettre en oeuvre avec et pour les populations locales. »

Retour à l'intro